...I should learn to look at an empty sky and feel its total dark sublime

Communiqué

Marc Bijl, Pierre Bismuth, Benjamin Bronni, Étienne Chambaud, Cyprien Gaillard, Julio Le Parc, Nico Vascellari
26/01/2012 > 24/03/2012

Vernissage le 26/01/2012, de 19h à 21h

"Were all stars to disappear or die I should learn to look at an empty sky and feel its total dark sublime"* est une phrase tirée du poème The More Loving One (1957) de Wystan Hugh AUDEN, que le peintre abstrait et théoricien Ad REINHARDT (1913-1967) a retenu pour exprimer sa démarche artistique, notamment dans son iconique série de monochromes noirs Ultimate Paintings. S'inspirant de cette phrase et de sa postérité, ... I should learn to look at an empty sky and feel its total dark sublime est le second volet d'une exposition en deux parties, qui présente différentes approches conceptuelles de l'art abstrait, ici à travers les œuvres de MARC BIJL, PIERRE BISMUTH, BENJAMIN BRONNI, ÉTIENNE CHAMBAUD, CYPRIEN GAILLARD, JULIO LE PARC, et NICO VASCELLARI.

MARC BIJL (né en 1970 à Rotterdam, vit et travaille à Berlin) questionne les symboles du pouvoir, aussi bien que ceux de la contestation pour en démonter les mécanismes et les enjeux, et ainsi mieux les confronter. Pour cette exposition, MARC BIJL présente deux œuvres très représentatives de son travail récent, qui tend vers une esthétique plus abstraite et minimale, donnant un aperçu du changement dans son approche artistique. Ces œuvres, références directes aux icônes de l'histoire de l'art moderne, tels que Mark ROTHKO ou encore Kasimir MALEVITCH, témoignent de la recherche de MARC BIJL d'un langage soutenu abstrait, qui est à bien des égards plus ambigu que le vocabulaire de ces œuvres antérieures.

PIERRE BISMUTH (né en 1963 à Neuilly-sur-Seine, vit et travaille à Bruxelles) utilise la pratique artistique comme moyen d'examiner notre perception de la réalité, notamment dans notre relation aux productions culturelles. Son travail tente avec humour et un minimum de moyens de déstabiliser les codes de lecture afin de redonner au spectateur une position incrédule même à l'égard des éléments de notre culture les plus acquis. Sa démarche se développe autour de l'idée que c'est en manipulant simplement la définition communément donnée aux choses que l'on en change la perception. Invité par le Centre Pompidou Metz à réaliser une commande spécifique pour l'exposition Chefs-d'œuvre, PIERRE BISMUTH a compilé l'ensemble des images des œuvres exposées à cette occasion, recouvrant par ce biais l'ensemble de la toile et brouillant ainsi la notion même du chef-d'œuvre.

À travers ses dessins, peintures et sculpture, qui sont toujours mis en scène sous la forme d'installations, BENJAMIN BRONNI (né en 1985 à Nürtingen, vit et travaille à Stuttgart) questionne l'espace. Il réalise des constructions surdimensionnées, telle que Untitled (Kugel und Scheibe), 2011, qui semble tenir sur un point d'équilibre fragile et dont le motif géométrique et les couleurs changent selon la position du spectateur dans l'espace. La précision mathématique des œuvres de BENJAMIN BRONNI plonge ainsi le spectateur dans un espace irréel.

ÉTIENNE CHAMBAUD (né en 1980 à Mulhouse, vit et travaille à Paris et à Milan) mène une réflexion exigeante sur la nature de l'œuvre d'art, sur les relations qu'elle entretient avec d'autres œuvres, sur les contextes et raisons de l'apparition des objets, sur la manière dont on les utilise et les charge de sens ou d'un récit particulier.
Le Troupeau du Dehors / The Outside Herd (Décor) est un fac-similé du monolithe noir figurant dans 2001 : l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick, qu'Etienne CHAMBAUD avait placé dans l'"arène des Macaques" du zoo de Mulhouse. Il s'agissait de reproduire les conditions de la scène primitive de la fiction kubrickienne dans la réalité : la rencontre des macaques et du monolithe était filmée et retransmise en direct au centre d'art de Lausanne Circuit. Selon une certaine logique skoreckienne, le post-cinéma trouvait ici sa résolution dans la télé-réalité. Et la tentative de rencontre se concluait par un constat de non-lieu dont le caractère déceptif avait valeur de métaphore quant aux réquisits de l'expérience de l'art.

Entre iconoclasme et esthétique minimale, romantisme et Land Art, le travail de CYPRIEN GAILLARD (né en 1980 à Paris, vit et travaille à Berlin) interroge la trace de l'homme dans la nature et face au passage du temps. À travers ses sculptures, peintures, gravures, photographies, vidéos et performances, mais aussi d'importantes installations et interventions dans l'espace public, CYPRIEN GAILLARD s'est imposé comme une figure majeure de la scène artistique internationale émergente. La série Fields of Rest, dont le titre fait référence aux fosses communes pendant la Révolution Française, rassemble des images prises par CYPRIEN GAILLARD lors de ces nombreux voyages à travers le monde. Fields of Rest, 2011, présentée dans cette exposition, représente des tranches de plaques de marbre empilées et bombées à la peinture. Le cadre resserré sur le sujet rend l'image complètement abstraite.

Révélé dans les années 1960, notamment au sein du Groupe de recherche d'art visuel dit GRAV (1960-1968), JULIO LE PARC (né en 1928 à Mendoza, Argentine, vit et travaille à Cachan) est un artiste argentin dont l'œuvre a initié nombre de modalités esthétiques contemporaines. Avec François MORELLET, il est considéré comme l'un des acteurs décisifs de l'art optique et cinétique, plus connu sous l'appellation de "op art", un courant international qui multiplie de 1950 à 1975 les recherches sur le mouvement et ses effets visuels. Fondé sur le trouble perceptif, la dématérialisation, la réduction formelle et l'étude du phénomène lumineux, le répertoire plastique de LE PARC se décline en autant de peintures, mobiles, reliefs et environnements qui s'appliquent à pervertir le régime scopique traditionnel de l'art, en perturbant jusqu'au vertige les conditions d'observation du spectateur.

L'anthropologie culturelle est le fil conducteur des installations complexes et excentriques de NICO VASCELLARI (né en 1976 à Vittorio Veneto (Italie) où il vit et travaille), installations combinant performances et éléments sculpturaux avec des dessins, des collages, des vidéos, et des extravagances sonores. Bus de la Lum (qui signifie littéralement dans le dialecte du nord de l'Italie "puit de lumière") est le nom de la large cavité naturelle située au Cœur de la forêt de Cansiglio, qui se trouve à proximité de l'atelier de NICO VASCELLARI et dont il c'est déjà inspiré pour ses recherches artistiques et performances. Le lieu était d'après la légende, hanté par des sorcières les nuits sans lune, et les hommes et les animaux qui osaient s'y aventurer y étaient oubliés ou détruits entre le miasme, la mousse et les rochers. Durant la Seconde Guerre Mondiale, Bus de la Lum est devenu un lieu sombrement mythique. Des centaines de personnes non identifiées, parfois encore vivantes, étaient jetées dans cette cavité, les mains attachées dans le dos. Les deux œuvres éponymes présentées ici, Bus de la Lum, 2011, jeux de transparence et de couleurs rappelant les sédiments minéraux, retranscrivent cette descente mortelle.

* "Si toutes les étoiles venaient à disparaître ou à mourir, je devrais apprendre à regarder un ciel vide et à trouver son obscurité totale