Benoit Broisat, James Hopkins
16/05/2008 > 12/07/2008

Vernissage le 16/05/2008, de 19h à 21h

The Other Way Around aborde la question de l'art comme un artifice, au travers d'oeuvres poussant le spectateur à accepter, voire même à inventer, des fictions susceptibles de correspondre à sa perception. Qu'elles déstabilisent ou qu'elles séduisent, ces œuvres nécessitent par essence d'être dévoilées. Entre histoire et mémoire, vérité et fiction, évidence matérielle et perception incertaine, cette quête de sens nécessite de voir et de comprendre au-delà des apparences, comme le suggère le titre de l'exposition.


À commencer par le titre lui-même (Title Work #372), tiré de la série Show Titles de Stefan BRÜGGEMANN, liste iconoclaste de titres d'expositions mis à la libre disposition de tous par l'artiste, qui en contrepartie ne demande qu'à apparaître dans la liste des artistes et des œuvres montrés – transformant ainsi l'élément le plus trivial d'une exposition en œuvre d'art. Comme son néon I Can't Explain and I Won't Even Try, qui postule avec ironie le refus de s'expliquer, l'oeuvre désamorce toute velléité d'explication, accomplissant un acte de disparition en elle-même.

Également inexplicable au premier abord, Mobil de Damien ROACH semble être une collection hétéroclite d'objets de bureau arrangés sur une étagère. Vus depuis un certain angle, ces objets s'articulent pour former le mot "mobil", transformant cette accumulation en une composition qui requiert, contrairement à ce qu'elle énonce, l'immobilité du spectateur. Une autre anamorphose, Verità (2006), présente une image de la colonie utopiste et naturiste de Monte Verità, qui ne se révèle que vue dans un cylindre en papier miroir. D'une vieille paire de baskets (Gumshoe, 2008), dont le titre joue sur un double sens en anglais (à la fois chewing gum collé sur le semelle et argot pour "détective", en référence à la discrétion que permettent des chaussures à la semelle en gomme) aux images récupérées de ses collages (Untitled (Firs) et Untitled, 2007), ROACH offre par de légers glissements de sens de nouvelles perspectives sur des objets quotidiens.

Entierro #1 (1989) et sa Levitation (1995) de Gianni MOTTI utilisent également la banalité de leur médium pour exposer leurs illusions. Ces grands formats photographiques documentent deux événements "incroyables" – les funérailles de l'artiste, et sa lévitation sous les mains d'un illusionniste –, et transforment par la grâce du document photographique ces canulars en événements médiatiques, pourtant tout aussi incroyables.

L'histoire, l'actualité et la vérité sont aussi en jeu dans trois œuvres de Jamie SHOVLIN, qui prennent comme point de départ des perceptions culturelles des Etats-Unis, redoublant l'ambiguité sociale avec l'illusion matérielle. Ainsi, Untitled (Comedie) and Untitled (Tragedie) (2008) sont des dessins en trompe l'oeil qui reproduisent des sculptures de signes de Jack PIERSON. Deux exemplaires de l'ouvrage classique de J.K. GALBRAITH, American Capitalism: The Concept of Countervailing Power semblent abandonnées sur le sol. Seul l'un des deux est réel, l'autre n'étant qu'une copie en plâtre plus grande que nature, comme un miroir illusoire du sujet.

Dans la deuxième salle, JAMES HOPKINS présente Eureka (2006), simple ampoule allumée sur le sol. Mais il apparaît que la lumière provient en fait d'un projecteur à diapositives vide posé derrière, créant un transfert aussi poétique qu'ironique entre les deux objets.

Comme un contrepoint au vide du projecteur, la vidéo de Benoît BROISAT, projetée dans la même pièce, Diary (2008) présente un montage trépidant d'images : au centre défile une séquence d'actualité, rephotographiée image par image dans un cadre quotidien, au gré des rendez-vous et des déplacements de l'artiste.